mercredi 19 novembre 2014

Technique - oui mais pourquoi ?

Préambule

Les vidéos, blogs et autres livres pullulent sur le marché, recherchés par des artistes plus ou moins autodidactes.
C'est ainsi qu'on se retrouve, ses outils à la main, dessinant ou peignant à la manière d'un ou d'une tel-le. Souvent, il s'agit de représenter un ou plusieurs effets, forcément stéréotypés, mais en lesquels on se retrouve plus ou moins, et où l'on peut parfois s'auto-satisfaire.
Lorsqu'on ne recherche pas un effet, c'est parfois une tradition tout entière que l'on cherche à s'approprier, à laquelle on désire souscrire. Il en est ainsi de l'art iconographique religieux, par exemple.
J'y ai pour ma part quelques temps adhéré, jusqu'au moment où j'ai ressenti quelques incohérences entre la démarche orthodoxe et la mienne. Il m'était trop difficile d'appliquer servilement la même démarche, encore et encore... Défaut d'humilité ? Besoin d'exploration surtout.
Mais je n'ai pas jeté le bébé avec l'eau du bain. Loin s'en faut. Car si, aujourd'hui, l'iconographie orthodoxe semble avoir tout dit de ce qu'elle avait à dire, elle demeure bien souvent un témoignage vivant des techniques de peinture disponible en tout temps à l'humain dans la nature (entendez hors technologie industrielle). C'est ainsi qu'aujourd'hui encore l'artiste peut mettre en oeuvre des matériaux simples, permettant de mettre au monde visible les images que son esprit peut produire. C'est déjà assez pour manifester sa reconnaissance aux garants de cette tradition picturale pluri-milénaire.
Il y a en plus, dans cet art religieux, un aspect liturgique qui a été codifié en rapport avec les différentes étapes de la création de l'icône.
Il y en a du reste plusieurs, mais je vais maintenant en résumer une qui correspond particulièrement à ma façon d'accoucher d'une image de mon état d'esprit. Il suffira de transposer les particularités propres à l'orthodoxie artistique pour imaginer ce qui se passe dans mon atelier.
Voici une transposition littérale de mes notes.

Processus pictural en forme de liturgie.


Résumé en video du processus iconographique (Prosopon School)
(en cas de problème, suivez ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=1oCEQJb4C7s )

  • Le dessin, Le signe, est relatif à une volonté personnelle et divine communes. Il est paré sur le gesso qui symbolise une première forme chaotique de lumière incréée.
[je passe ici sur la pose du bol d'Arménie ainsi que sur la dorure des auréoles ]
  • L'ouverture est la pose des couleurs de fond. Bien que parfois translucides, on les veut riches, saturées, profondes. C'est la vie qui sort du chaos, qui s'y appose.
  • On reprend ensuite les traits du dessin au pinceau fin et en couleur sombre. C'est la Parole, la Loi qui définit l’homme, la vie.
  • Vient ensuite la pose des premières lumières créées. Elles disent les volumes et les formes, la réalite physique, matérielle.  Attention, il n'y a pas de place pour l'ombre sur une icône. C'est bien les lumières qui définissent, en surgissant des couleurs du fond. On assiste à une naissance par la lumière. Non une immersion de lumière, mais une émergence de lumière.
  • On voile ensuite cette première lumière ; il ne s'agit pas de la cacher, mais de préparer l'apparition d'une seconde lumière. Ce voile est un glacis coloré, encore peu chargé de blanc. Ce sera une harmonique du fond, similaire ou complémentaire.
  • La seconde lumière est alors posée d'une manière plus fine et plus discrète que la précédente. Elle symbolise la réalité noétique (spirituelle, intellectuelle).
  • Selon un principe déjà connu, on pose un second voile sur cette lumière.
  • On pose alors la troisième lumière créée. Elle montre la réalité angélique ou contemplative. Bien qu'encore plus discrètes que les précédentes, ces touches présentent ou “définissent” encore mieux l'hypostase de l'icône.
  • On pose un nouveau voile (ou glacis)  .
  • Viennent alors les ultimes lumières, incréées, quelques rehauts discrets, sobres, lumières essentielles, suffisantes, qui répondent aux premières lueurs chaotiques du gesso.
  • Vient ensuite l'onction. C'est le vernissage à l'huile pure que l'on enduit après séchage complet des couleurs de l'icône.


demo sur un visage

... Alors ...

Bien que ne prétendant pas formellement à la religiosité de mes images, je revendique comme artiste le statut de révélateur. En cela, malgré une certaine et relative distance avec la tradition orthodoxe, je pense que les techniques utilisées par l'artiste sont elles aussi révélatrices. Elles montrent le chemin emprunté par une réalité universelle pour surgir à travers la nature même de l'artiste.

English Résumé

In this article, I just try to find an interaction between a spiritual and a pictural process. Does the creativity follow pages of commercial art book or the spiritual paths of my mind ? I give here  the example of the orthodox tradition of iconography which gives liturgic meanings to a very ancient way of making images.

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